En me prosternant humblement derrière l’imam (que la majorité d’entre nous ne connaît pourtant pas), je ne me suis jamais demandé s’il était d’obédience soufie ou salafite, « sunnite » ou chiite, Pulaar ou Sereer, Géer ou Gewel. Que m’importait, en vérité, qu’il récite ou non la Basmallah au début de la Fatiha, qu’il posait ou non ses deux mains sur sa poitrine en récitant le Coran ? L’essentiel n’était-il pas qu’il priait ? Que m’importait, au fond, qu’il soit de telle classe sociale, de telle « caste » ou ethnie, du moment qu’il me transmettait le plus fidèlement qu’il pouvait le message de mon Seigneur et de notre Bien-Aimé Prophète (PSL) ? Que m’importait que ses habits soient aux couleurs de tel parti politique ou de tel autre ?
Pardi ! Ne devrais-je plus tendre les mains et dire « amin » durant le sermon de mon imam, juste parce qu’il était Tidiane, faisait le « wazifa » ou la « hadratu jumu’a » ? Qu’il était Layène et se rendait tous les ans à Yoff pour commémorer l’Appel historique de Seydina Limamou ? Qu’il était « Ibadou » et portait la barbe ? Qu’il était mouride, récitait les saints « khassaides » de Serigne Touba et portait un « Baye Lahad » ?
C’est en ces moments de communion spirituelle intense des sénégalais que l’on se rend le plus compte que nos différences formelles et de points de doctrine ne tiennent pas, en réalité, devant notre ultime unicité de foi. Et qu’au-delà de nos sensibilités et caractéristiques diverses et légitimes (chacun d’entre nous ayant ses convictions propres qu’il a le droit de défendre et de promouvoir), la force de notre peuple réside dans cette capacité que nous avons d’accepter l’autre et de respecter ses choix. Tant que ceux-ci n’agressent pas frontalement ceux des autres ou remettent en cause les fondements sacrés qui nous unissent.
Et cela, nous le devons surtout au génie de nos Pères Fondateurs (mag ñu baax ñi). A ces grandes figures historiques religieuses qui nous ont appris la Foi (Ngëm), la Patience (Muñ), l’Amour du prochain, le Respect de l’autre, la Tolérance et la Culture de la Paix. Ce précieux et commun legs qu’il nous appartiendra à tous de préserver jalousement contre les germes (internes et externes) de division, d’adversité et de déstabilisation qui risqueraient d’être préjudiciables à tous. Sans distinction d’obédience ou d’appartenance.
Croyez-vous que si jamais vous brûlez ce beau pays, votre famille, vos enfants, vos amis, votre obédience ou confrérie seraient saufs ? Yàlla na ñu sunu Boroom sàmm et fasse toujours de notre pays ce havre de tolérance pacifique…