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L’individualisation de la sanction pénale.

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Si le législateur a un pouvoir d’incrimination qu’il tient du principe de la légalité, il revient aux juridictions de jugement de fixer la sanction pénale dans les limites que celui-ci a tracées.

Cette mise en œuvre de la sanction pénale s’apprécie par rapport à l’intime conviction que le juge peut avoir d’une affaire à une autre. C’est ce que l’on appelle le pouvoir d’individualisation du juge. Toutefois, il revient à l’esprit de s’interroger sur le fait de savoir comment se déploie un tel pouvoir d’individualisation en matière de fixation de la sanction pénale. Mais encore l’individualisation de la sanction pénale devrait elle être mue par un sentiment fantaisiste ou anarchique que le juge aurait pu avoir d’une affaire donnée ? Autant de questions permettent d’objecter que la loi accorde au juge deux prérogatives qui jouent un rôle capital dans le fonctionnement de la justice répressive. En effet la loi permet au juge de descendre au minimum légal ou d’ordonner qu’il sera sursis à l’exécution de certaines peines.

Toujours est-il que depuis la loi 2000-39, le juge a la possibilité d’ordonner la dispense de la peine ou son ajournement. Mais ce procédé souffre aujourd’hui d’une ineffectivité par rapport aux mesures classiques à savoir les circonstances atténuantes (I) et les sursis (II)

I_ LES CIRCONSTANCES ATTENUANTES

L’accent sera mis sur l’effectivité des circonstances atténuantes (A) et à leurs effets (B)

A- L’effectivité des circonstances atténuantes

Les circonstances atténuantes sont des éléments de la situation criminelle que le juge prend en considération pour abaisser le taux de la peine. Elles ne se distinguent des excuses atténuantes lesquelles sont prévues par la loi et que le juge est obligé d’appliquer sans avoir aucun pouvoir d’appréciation. Par contre les circonstances atténuantes sont laissées à l’appréciation du juge. Elles sont pour le juge un moyen de corriger les insuffisances ou les excès de la loi et de faire coïncider sa décision aux caractéristiques individuelles du cas qui lui est soumis. Les circonstances atténuantes permettent enfin au juge d’individualiser la peine en fonction des éléments toujours différents de chaque espèce. Toutefois faudra remarquer qu’en droit sénégalais (voir article 344 CPP) le domaine des circonstances atténuantes est vaste et joue pour toutes les infractions (crime, délit, contravention). Lorsque le juge accorde le bénéfice des circonstances atténuantes, il n’a pas besoin de préciser les circonstances de l’espèce qui lui ont paru atténuantes. Le juge n’a qu’à affirmer qu’il y a des circonstances atténuantes sans indiquer lesquelles ; c’est ce qui se passe à la Cour d’Assise. Bien mieux, le juge correctionnel lui-même n’a pas besoin ni de préciser les circonstances atténuantes, ni même d’en affirmer l’existence ; le seul fait qu’il a prononcé une peine inférieure au minimum suffit à démontrer implicitement qu’il avait trouvé des circonstances atténuantes.

Le juge en arrive ainsi à corriger la rigidité de la loi ; il suffit que le minimum légal lui parait trop élevé pour qu’il soit autorisé à appliquer une peine plus basse.

B- Effets des circonstances atténuantes

Les circonstances atténuantes ne modifient pas la nature juridique des infractions auxquelles les juges ont estimés devoir les appliquer. Il importe peu à ce sujet que les circonstances atténuantes aboutissent à transformer la nature juridique de la peine prononcée et à faire passer par exemple une peine criminelle à une peine correctionnelle ou d’une peine correctionnelle à une peine de police. Les effets des circonstances atténuantes sont différents selon que l’on se trouve en matière criminelle, correctionnelle ou contraventionnelle.

En matière criminelle l’on se trouvait en matière d’un crime passible de la peine de mort, les circonstances atténuantes permettent de descendre jusqu’à 3ans de prison. Si la peine prévue était une peine perpétuelle, le juge qui accorde les circonstances pourra descendre jusqu’à 2ans de prison.

En matière correctionnelle, les circonstances atténuantes permettent au juge de descendre jusqu’au minimum de la peine contraventionnelle.

Cependant pour les peines complémentaires obligatoires, il y a lieu de souligner que les circonstances atténuantes permettent d’écarter les peines complémentaires obligatoires qui sont des peines véritables mais non pas celles qui sont en réalité des mesures de sûreté.

Au surplus, la Cour de Cassation a décidé que l’octroi des circonstances atténuantes n’empêche pas le juge qui prononçait contre le prévenu la peine complémentaire du retrait du permis de conduire de donner à cette sanction sa durée maximale (Crim 25 mars 1965 GAZ PAL 1965). Quid des autres procédés d’individualisation de la sanction pénale.

II_ LES SURSIS

Ici on mettra l’accent sur le sursis simple (A) et le sursis avec mise à l’épreuve (B).

A- la mise en œuvre du sursis simple

Il faut commencer par rappeler que le second pouvoir qui est donné au juge pour la fixation de la peine, c’est de décider que la peine qu’il prononce ne sera pas immédiatement exécutée mais au contraire il sera sursis à cette exécution.
Les articles 704 et suivants du CPP en constituent une parfaite illustration.
Le sursis simple obéit à certaines conditions et peut être ordonné dans les situations suivantes :
– le sursis peut être ordonné lorsque le prévenu n’a pas déjà été condamné pour crime ou délit de droit commun soit à une peine criminelle soit à une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure à 2 ans
– le sursis est applicable aux condamnations pour crime ou délit à des peines d’emprisonnement ou d’amende
Toutefois il y a certaines infractions qui font obstacle à l’octroi du sursis, il s’agit du viol (article 320 CP), des infractions relatives à la drogue.

Donc il revient au juge d’apprécier s’il y a lieu d’accorder le sursis à tel délinquant qui réunit les conditions pour en bénéficier. Le sursis n’est pas une faveur naturelle aux délinquants dignes d’indulgence. Il doit être réservé à ceux dont on a de bonnes raisons de penser que l’éventualité d’avoir à exécuter leur peine suffira de les détourner de la rechute.
Si la juridiction de jugement accorde le sursis simple, le président doit adresser au condamné un avertissement particulier et solennel pour l’informer des effets de la mesure.
Quant aux effets du sursis simple, il faudra noter que la condamnation affectée du sursis est une condamnation pénale à exécution essentiellement conditionnelle et qui sera effacée par l’expiration sans incident d’un certain délai d’épreuve qui est de 5ans. SI dans ce délai intervient une condamnation de cette nature, le sursis sera révoqué et le condamné devra exécuter la condamnation ou la partie de la condamnation pour laquelle il avait bénéficié du sursis et ensuite la nouvelle condamnation qui vient de lui être infligée.
Par contre si le délai d’épreuve s’écoule dans des conditions satisfaisantes, la condamnation avec sursis ne sera jamais exécutée, et même elle sera non avenue.

B- le sursis avec mise à l’épreuve

Cette institution a été consacrée par le CPP en ses articles 707 et suivants. Comme le sursis simple, le sursis probatoire est laissé à la libre appréciation du juge. Ce dernier décide si le sursis probatoire accordé est total ou partiel. Si c’est un sursis partiel, le juge fixera la durée de la partie de la peine d’emprisonnement qui sera exécutée immédiatement. Seulement à la différence du sursis simple, le juge doit fixer les modalités de l’épreuve. L’épreuve doit comporter deux séries de prescriptions. Certaines sont d’ordre général et s’appliquent automatiquement à tous les probationnaires.
Par contre d’autres ont un caractère individuel. C’est le juge qui les impose au probationnaire dans la mesure où il estime certaines d’entre elles nécessaires.
Quant à ses effets, il faut noter que l’exécution de la peine privative de liberté est suspendue. L’épreuve se déroule avec les diverses obligations qu’elle comporte sous le contrôle du juge de l’application des peines (JAP).
il faut souligner que si le probationnaire n’observe pas les obligations qui lui sont imposées, le JAP peut demander au tribunal de prononcer la mise à exécution immédiate de la peine ; le Ministère Public peut agir également dans ce sens.

Abdoulaye Santos Ndao

Juriste, Consultant en droit Privé.

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