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Véritable exception dans un pays à constitution laïque, Touba, la seconde ville la plus peuplée du Sénégal, entend appliquer un système légal basé sur la charia. Une police spéciale y veille.
Un soleil de plomb vide les artères de Touba, au Sénégal. Dimanche, onze heures, dans le quartier de Khayra.
Sous les arbres à palabres, on se partage du thé ou du café Touba, un délicieux arabica poivré.
En s’enfonçant dans les ruelles ensablées, les véhicules se raréfient.
Un groupe d’adolescentes en robes améthystes quêtent, panier à la main.
Les « Dahiras » collectent l’argent de la confrérie des Mourides (NDLR, un courant du soufisme particulièrement présent au Sénégal ), pour la préparation d’un grand événement ou de projets communautaires.
Une rue perpendiculaire conduit à une école.
Des chants résonnent au-delà des murs d’enceinte du bâtiment.
Un chœur d’enfants psalmodie les poèmes de Serigne Touba, le fondateur vénéré de la ville.
Les bancs de l’établissement coranique Cheikh Moustapha Faliou sont pleins.
Au milieu de la cour sablonneuse, M. Dieng, l’austère directeur en boubou blanc, égrène son tasbih, le chapelet musulman.
Il arpente la cour sablonneuse : « Nous ne travaillons pas le jeudi ni le vendredi, jour de la grande prière ».
Le week-end, dans le reste du Sénégal laïque, on ferme les écoles et les boutiques.
Pourtant à Touba, les jeunes talibés (disciples) envahissent les trois salles de classe animées, à l’image du reste de la ville.
Les inscriptions en arabe détonnent sur les murs ocres et vermillons de cette petite école de quartier.
Vertes, aux couleurs de l’islam, elles valorisent la droiture et l’obéissance dans un français approximatif : « Eduqu un enfant égal gagne un pays » (sic).
« Nous leur apprenons le coran et l’arabe de trois à onze ans », explique M. Dieng.
Pas uniquement, se défend-il, en désignant des manuels scolaires : « Le français aussi.
Regardez… » Sous son doigt défilent des dessins d’animaux, sous lesquels il faut apposer le nom correspondant.
En grande section, on effleure des notions de calcul.
« On donne aussi des bases de géographie et d’histoire. »
Adossé à un mur en face de l’école, un ancien élève se confie dans un français hésitant: « Ici, on apprend surtout le coran et l’arabe. Après, on n’apprend plus rien. »